La main d'une femme tapant sur une calculette posée sur une table.
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La justice invalide la décision de 2016 de la Commission européenne qui condamnait Apple à verser 13 milliards d’euros d’impôts impayés à l’Irlande, rapporte le journal français Les Échos.

C’est un coup dur pour la Commissaire européenne à la Concurrence de l’époque qui occupe actuellement le poste de vice-présidente de la Commission, Margrethe Vestager. Ce combat avait propulsé la Danoise sur la scène internationale, à titre d’emblème de la résistance aux GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon).

Pour infliger cet impayé à Apple, Margrethe Vestager avait considéré les rescrits fiscaux, les accords où l’Irlande permettait à Apple de ne payer qu’« un taux d’impôt sur les sociétés effectif de 1 % en 2003 sur ses profits européens, tombé à 0,005 % en 2014 », comme des aides d’État illégales au regard du droit de l’Union.

Selon elle, ces accords nuisaient à la concurrence puisque la plupart des entreprises ne bénéficient pas du même traitement.

Apple s’était élevée contre cette décision. Selon l’entreprise, il ne s’agissait pas de profits européens, mais plutôt des résultats de ses activités de design et de marketing aux États-Unis et elle devait donc des impôts à ce pays. Sur la période incriminée par la Commission européenne (2003-2014), le géant technologique ne payait toutefois pas le fisc américain sur ces sommes, se contentant de le stocker offshore pour le rapatrier aux États-Unis dès qu’une réforme fiscale rendrait cela possible.

L’opportunité s’est présentée à la suite de l’entrée en poste de Donald Trump comme président, qui a fait passer le taux d’imposition des profits rapatriés aux États-Unis de 39 % à 15 %. Apple a donc transféré ses 245 G$ offshore, payant tout de même au passage 38 G$ à l’IRS.

Toutefois la question des 13 milliards d’euros possiblement dus à l’Irlande restait en suspens. Paradoxalement, l’Irlande s’est jointe à la plainte d’Apple, car Dublin refusait de toucher à sa fiscalité accommodante qui a vu les géants du numérique affluer en nombre sur l’île pour y établir leurs sièges sociaux. Pourtant, les 13 milliards d’euros auraient permis de combler une partie du déficit budgétaire dû à la COVID-19.

Du côté d’Apple, la décision de la cour fait unanimement des heureux.

« Nous nous réjouissons [que la Cour] ait rejeté la plainte de la Commission, écrit l’entreprise dans un communiqué. Cette affaire ne portait pas sur le montant des impôts que nous payons, mais sur le lieu où nous sommes tenus de le payer. Nous sommes fiers d’être le plus grand contribuable au monde, car nous savons le rôle fondamental que jouent les impôts dans nos sociétés. »

Apple reconnaît également la nécessité de réformer la fiscalité du numérique. « Modifier la façon dont les impôts sur les sociétés des multinationales sont répartis entre différents pays nécessite une solution globale, et Apple encourage la poursuite de ces travaux », affirmait l’entreprise par voie de communiqué.

Pour la Commission européenne qui avait fait de l’offensive contre les « aides d’État » fiscales son cheval de bataille, c’est un coup dur. Surtout que d’autres dossiers de ce genre sont actuellement sur la table. On peut penser aux accords fiscaux dont bénéficient Nike et Ikea aux Pays-Bas ou Huhtamaki au Luxembourg. Ces derniers pourraient bénéficier de la décision du Tribunal de l’Union européenne sur un dossier aussi majeur que celui d’Apple.

En attendant un éventuel appel, Bruxelles ne peut plus s’appuyer que sur les travaux de l’OCDE pour réformer la fiscalité du numérique.